vendredi 27 juillet 2012

Le Tueur: Premier cycle

letueurEn format unique pratique, avec un beau visuel de couverture, des trois premier tomes de la série du tueur: Long feu, L'engrenage et La dette. Le tueur, ce personnage solitaire froid, méthodique qui aime faire consciencieusement son travail. Le lecteur ne connaît pas son nom. D'ailleurs, personne ne connaît le nom de cet individu, qui change de commanditaire à chaque mission, sans jamais déroger à ses principes rigoureux d'exécution. Pour ambiance oppressante avec des dialogues de qualité, le tueur s'impose.

Le Tueur: Premier cyclede Matz et Luc Jacamon, Ligne rouge, 184 pages, 15,20 euros

Fille du samouraï



samouraiExilée,  lorsqu’elle écrit les mystères d’un Paris métissé de black-blanc-beur, Dominique Sylvain  se plonge dans ses souvenirs. Elle aime le mélange des genres, ses romans oscillent entre la comédie macabre et le comique de situation qui se crée tous les jours dans la rue. L’étrange drame qui dérange plonge ses racines dans ce banal quotidien.

Son précédent roman, Passage du désir, voyait les débuts de deux femmes aux cœurs brisés, Ingrid Diesel et Lola Jost. Ce livre a reçu le prix des lectrices de Elle. Les aventures du duo de choc reprennent. Ingrid Diesel, la jeune Américaine généreuse, toute en muscles, épaule de nouveau Lola Jost, la Française, d’un certain âge, aux allures de bobonne inoffensive.

Par le canal de la télévision, un père apprend la mort de sa fille. Après être passée, par la fenêtre ouverte, cette jeune personne, sosie d’une chanteuse pour adolescentes prépubères, a embrassé le sol en tombant du 34e étage de l’hôtel Astor Maillol où elle séjournait. L’abus de champagne et une mauvaise hygiène de vie supposée précipitent les conclusions policières. L’enquête favorise la thèse du suicide. Pour Maurice Bonin, le père de la jeune fille, rien n’est moins sûr et il veut en convaincre ses deux amies, Ingrid Diesel, la masseuse de jour qui s’effeuille la nuit, et Lola Jost, l’ancien commissaire de police accrochée à ses puzzles. L’une s’active, l’autre réfléchit.

Fille du samouraï de Dominique Sylvain, Aux éditions Viviane Hamy, 284 pages, 9,99 euros.






Mystère rue des Saints-Pères

iznerLe pseudonyme ne l’indique pas, mais cet écrivain sont deux sœurs en une seule plume. Liliane Korb, ancienne chef monteuse de cinéma, devenue bouquiniste, et Laurence Lefèvre, licenciée en archéologie, aujourd‘hui libraire et écrivain. Elles écrivent ensemble depuis longtemps, tant pour la jeunesse que pour les adultes. De leur goût commun pour l’histoire et le polar est née l’idée de créer un nouveau personnage. Libraire, Victor Legris mène une vie rendue moins quotidienne grâce aux enquêtes qu’il s’attribue dans le Paris de la fin du XIXe siècle.

Attraction de l’Exposition universelle en juin 1889, la tour Eiffel est connaîtra 3.512.000 ascensionnistes en six mois. La foule afflue dans les pavillons célébrant les colonies. Les mondes encore libres sont l’objet d’une course de vitesse entre les peuples de l’Europe, d’après le préfet Eugène René Poubelle. Du haut de la tour, Le Figaro édite une «spéciale» chaque jour. Au bar américain du premier étage, Victor Legris a rendez-vous avec un ami journaliste, Marius Bonnet. Ce dernier lui fait une proposition. Bonnet vient de lancer un nouveau titre Le passe-partout un quotidien plein d’avenir dont il est le directeur et rédacteur en chef. Il recherche des collaborateurs afin d’élargir sa palette. Malheureusement leur entretien va tourner court. Une femme s’écroule, victime d’une piqûre sur la plate-forme. L’actualité n’attend pas. Cette mort brutale est la première d’une série de meurtres inexpliqués, voici donc les débuts d’enquêteur de Victor Legris dans les nouveaux mystères de Paris.

Mystère rue des Saints-Pères de Claude Izner aux éditions 10/18, 282 pages, 7,13 euros.

De cape et de crocs: de la lune à la terre

19_cape-et-de-crocsDon Lope le loup, le renard Armand et Eusèbe le lapin tirent leur révérence sur dix-sept ans de fringants délires et de citations d’Edmond Rostand. À la manière d’une comédie, chaque protagoniste est un archétype théâtral. Tenant à respecter l’esprit, plutôt que de restituer avec fidélité le XVIIe siècle, les auteurs s’inclinent devant le sieur Cyrano de Bergerac. Son Histoire comique des États et Empires de la lune, dans laquelle il exprime sa philosophie matérialiste, donne une trame à cet album. Un clin d’œil rendu par les auteurs au philosophe poète et spadassin, qui mourut d’une mauvaise tuile.

La qualité du langage employé touchera même un lecteur non amateur de bande dessinée.

Pour nos vaillants héros le temps est venu de rentrer, mais le traître n’a pas dit son dernier mot. L’honneur va s’opposer à l’amitié. Le nom du maître d’armes ne sera pas révélé. Quelle gageure que de surprendre son public dans le final!

De cape et de crocs: de la lune à la terre d’Alain Ayroles et Jean-Luc Masbou aux éditions Album Delcourt 49 pages, 13,26 euros.

En charmante compagnie

charmanteEnseignant, membre du comité de bioéthique à l’UNESCO, Alexander Mc Call Smith vit à Edimbourg. Né au Zimbabwe, il a contribué à l’organisation de la première école de droit du Botswana. Dans la beauté des paysages et des couleurs de l’Afrique, des gens veulent simplement vivre au quotidien. En s’aidant d’un manuel, Precious Ramotswe a fondé l’Agence Numéro Un des Dames Détectives du Botswana. Cette femme encore jeune, dotée d’une constitution traditionnelle, a lutté pour s’imposer dans son travail. Tout homme peut prétendre à être un puits de science, mais aucun d’entre eux ne peut percer à jour l’alchimie des sentiments humains.

Perspicace, un peu chaman sur les bords, Mma Ramotswe est aidée dans sa tâche par son associée Mma Makutsi . Les déboires sentimentaux de sa collègue alimentent les potins locaux. Heureusement, la légendaire politesse botswanaise interdit d’en parler devant la personne. Pour le reste, Precious Ramotswe fait tourner son affaire, elle songerait même à embaucher.

Dans un pays brûlé par le soleil, dont les odeurs et les bruits affleurent à chaque page, les affaires des hommes sont bien ordinaires. Au détriment de la vieille morale botswanaise que Charlie, l’apprenti mécanicien, vient de tout plaquer pour suivre une riche rombière. Ce scandale ne suffit pas à plomber l’ambiance. Depuis quelques jours, un fantôme a surgi du passé, il arpente les rues de Gaborone, voilà ce qui tourmente la dame détective.

En charmante compagnie d'Alexander McCall Smith, 10/18 grands détectives, 288 pages, 7,13 euros.

Nostradamus et le dragon de Raphaël

NostradaL’auteur écrit des romans historiques et policiers. Documentées, les intrigues cernent l’histoire de France en l’utilisant pour la narration romanesque. Dans ce cadre authentique, on croise du beau monde à chaque page.

En 1536, Charles Quint veut que Dieu règne sur son empire romain d’occident. Un pays figure au milieu de ce projet. L’armée impériale envahit la France.

Vidée de ses habitants la Provence est pillée. La ville d’Aix est dévastée. Organisés, les résistants harcèlent les impériaux,  arrive la peste. L’empereur doit abandonner ses conquêtes et le butin sera caché. Le temps passe, jusqu’en 1564. Par malheur, le roi de France est un enfant de treize ans; dont la mère, Catherine de Médicis, s’évertue à la régence. Il lui faut conserver la monarchie à ses enfants. En ces temps troublés, chaque chef de parti religieux veut imposer son rite, son dieu, au détriment du pays et de l'ensemble des habitants. Un manuscrit est retrouvé. Rédigé en quatrains, il indique la cachette d’un trésor enfoui à Aix.

La fin des conflits armés entre les partisans de la réforme et les tenants de l’Église catholique sauvera le pays. La reine mère a besoin d’argent pour acheter la paix. Pour s’octroyer cette fortune, Catherine de Médicis réclame de l’aide à un ancien courtisan, Michel de Nostredame, un médecin astrologue qui vit retiré à salon-de-Provence. Aidé de son filleul Yohan, Nostradamus sera-t-il assez bon devin pour retrouver le trésor?

Nostradamus et le dragon de Raphaël de Jean d’Aillon, labyrinthes éditions Le masque. 457 pages, 8,26 euros.

jeudi 26 juillet 2012

À la trace

traceActuellement, Deon Meyer est l’auteur sud-africain le plus traduit. L’écrivain change ici son type de structure narrative. Dans cet opus, trois personnages ont trouvé leur auteur.

Août 2009, les services secrets débordent d’activité dans la capitale de l’Afrique du Sud. En dépit de cette agitation, le premier des personnages est une femme qui refait sa vie. Dans une société traditionaliste où l’émancipation féminine doit prendre forme. Ailleurs réapparaît un ancien garde du corps qui accepte la mission de protéger le convoi d’une espèce en voie d’extinction. Les activités pittoresques de la contrebande internationale ne lui causeront que des soucis. Le troisième volet incorpore au récit le personnage d’un détective devenu privé. Chargé d’enquêter sur une disparition, il découvre la culture gangsta rap des villes, tout en démêlant l’écheveau d'une pluralité d’activités criminelles.

La singularité d’une nation arc-en-ciel se reflète à merveille dans ce livre fleuve.

À la trace de Deon Meyer aux éditions du Seuil 724 pages, 22,04 euros.

Dans mon open space, tome 4: Variable d'ajustement

openspaceJames a abandonné une carrière de cadre afin de se consacrer à la bande dessinée. Il a débuté à l’Association (utopie éditoriale et esthétique créée en 1990). Ce quatrième album regroupe une série en six cases parue dans Challenges magazine.

L’auteur y revisite sa période d’emploi dans une entreprise. Le quotidien des salariés, les faits marquants de l’actualité sont commentés par les cadres d’une société spécialisée dans les dessous féminins. Une seule femme est cadre de direction, potentiellement, l’employé devient un sans-bureau-fixe. Esope précéda La Fontaine dans la fable animalière, exercice repris ici. Quel type de pachyderme véloce est très myope? Le patron rhinocéros, qui braille en portant des lunettes. Le directeur commercial, misogyne, fanatique de sport, lecteur assidu de presse spécialisée, est un bovin. Les audits sont deux charognards chargés des économies en personnel. Le traitement animalier des personnages permet de sourire des usages sans alourdir le propos.

Dans mon open space, tome 4: Variable d'ajustement de James aux éditions Poisson Pilote Album, 48 pages, 11,40 euros

La Nuit du Crystal

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En 1960, le sociologue Edgar Morin et le cinéaste Jean Rouch ont enquêté sur la vie quotidienne de jeunes Parisiens afin de d’appréhender leur conception du bonheur. Journaliste, homme de radio et de télévision, on peut se demander si Jérôme Bellay, né en 1942, n’apporte pas sa réponse à cette «chronique d’ un été 1960». Natif de Chalon-sur-Saône, Jérôme Bellay a choisi la ville de Reims pour évoquer la jeunesse d’une bande de rockers éclatés dans les bulles de champagne.

Il dédicace ce livre à sa compagne, l’ancienne reine du disco, Karen Cheryl. En avant la musique.

À cette époque, la guerre d’Algérie attend les garçons et les filles font attention à ne pas tomber enceintes. Les parents sont ailleurs, dans un autre monde social, occupés dans une autre réalité. Ces jeunes plus ou moins beurrés sur tranche passent l’été de leur baccalauréat. La drogue reste timide. Des petits gars bien de chez nous, aux postures de voyous, qui cassent tout, volent des trucs, boivent comme des trous. Des phallocrates des temps anciens qui s’ennuient, bourrés. La tournante contre une godiche étrangère à leur groupe, c’est uniquement pour se distraire. Quels ravages cause cette absence de repères chez les jeunes, en autarcie, depuis la fin de la guerre! Qu’ils n’ont pas connue les veinards!

Une de leurs journées finit mal. Après une intrusion par effraction, un meurtre est commis, le chef du groupe soupçonné. Vingt ans après, la vérité doit éclater. La Nuit de cristal est le nom que les nazis donnèrent au pogrom de la nuit du 9 au 10 novembre 1938. Ce jeu de mots en titre est gênant. Il faut reconnaître que la cuvée Cristal est ce qui se fait de mieux dans les bulles chez Roederer. D’après ce qu’on dit.

La Nuit du Crystal de Jérôme Bellay, Le Cherche-Midi éditeur, 300 pages, 16,39 euros.

Les fantômes de Belfast

BelfastL’accord pour la paix du 10 avril 1998 a mis fin à quatre-vingts ans de guerre en Irlande du Nord. Lors de ce conflit fratricide, pour que triomphe «la cause», des hommes et des femmes sont devenus incendiaires, maîtres chanteurs, assassins. Jugés, emprisonnés, ces coupables deviennent des prisonniers politiques, objets des manifestations de la foule qui réclame leur libération.

Le titre original «Les douze» donne le sujet de ce roman noir. Douze est le nombre d’assassinats commis par le tueur paramilitaire Gerry Fegan. Quand il est libéré, ces crimes de guerre deviennent des meurtres. En temps de paix, Gerry Fegan boit pour oublier les cris de vengeance qu’il entend dans sa tête. Ses voix le damnent. Chaque soir, il se donne en spectacle, dénonce en hurlant les calculs politiques responsables des meurtres. Ses douze victimes crient justice. Il part en guerre contre les politiciens, les forces de police, les badauds qui regardent sans rien dire. Tout le monde doit payer un tribut aux morts.

Dans le contexte de l’Irlande d’après la sale guerre, le lecteur arpente les rues de Belfast, où, pour l’auteur, les figures des voyous et des politiques ne sont pas dissociables. Originaire d’Irlande du Nord, l’écrivain Stuart Neville ne déborde pas d’optimisme. La paix ne signifie pas, pour lui, la fin de tous les conflits. Ce livre est le premier tome d’une série de trois que devrait publier l’éditeur.

Les fantômes de Belfast de Stuart Neville, aux éditions Rivages Thriller, 411 pages, 16,99 euros.

mercredi 25 juillet 2012

Le baron Noir


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En 1976, dans le mensuel L’Écho des savanes, le baron noir s’était envolé. Parfois il lui arrivera d’être dessiné par d’autres, comme Christian Godard, Mandryka, Martin Veyron. Le rapace a volé de case en case dans Le Matin de Paris de 1977 à 1981. Cette intégrale a été corrigée par ses auteurs. Le propos s’est porté davantage sur l’environnement, au détriment de la critique sociale.

Dans cet album anthropomorphique, les animaux s’interrogent à propos de tout pour ne jamais rien changer. Chasseur sans scrupule, l’aigle baron noir s’occupe à décimer les rangs du troupeau de moutons. Fatalistes, les ovins immobiles subissent en bêlant les attaques en piqué du prédateur. Ils ne bougeront pas, jusqu’à la prochaine. Lui, le cruel prédateur, s’interroge, en grand tourmenté, sur ses motivations. Pourquoi chasse-t-il? La faim n’existe plus, l’ennui peut-être?

Le troupeau à poil laineux côtoie des rhinocéros policiers, des tatous capitalistes. L’apparition du baron noir nourrit les analyses des personnages. Son absence préoccupe les tortues philosophes davantage que ses nuisances. Jo le Crocodile est un ambitieux rampant. Le danger pour le féodal prédateur viendra d’ailleurs. Un dragon libéral, un robot formaté originaire d’une contrée exotique, prendra sa place. À la fin des années Giscard, la montée du libéralisme sauvage s’amorce. À chacun sa place dans l’ordre économique et le troupeau sera bien gardé.n noir s’occupe à décimer les rangs du troupeau de moutons. Fatalistes, les ovins immobiles subissent en bêlant les attaques en piqué du prédateur. Ils ne bougeront pas, jusqu’à la prochaine. Lui, le cruel prédateur, s’interroge, en grand tourmenté, sur ses motivations. Pourquoi chasse-t-il? La faim n’existe plus, l’ennui peut-être?

Le baron Noir de Yves Got et René Pétillon aux éditions Drugstore, 248 pages, 28.50 euros

mardi 24 juillet 2012

Les Enfants du massacre

Giorgio Scerbanenco (1911-1969) est né à Kiev d'une mère italienne et d'un père ukrainien fusillé durant la révolution d'octobre 1917. Autodidacte, il a fait tous les métiers pour vivre : balayeur, manœuvre, tourneur. Dans le même temps il fréquente les bibliothèques publiques auxquelles il peut avoir accès. Au retour d'un séjour en sanatorium, il travaille comme scénariste et essaie de vendre des espaces publicitaires dans des publications fantômes. Il débute en littérature par un récit publié dans un magazine populaire.

Pendant trente ans il collabore à une maison d'édition milanaise pour laquelle il écrit un milliers de conte, récits, nouvelles auxquels s'ajouteront des romans, le tout à l'eau de rose. Anti-Mussolinien, il doit se réfugier en Suisse où il est interné jusqu'à la fin de la guerre. De retour à Milan il devient directeur d'un magazine féminin où il dirige la rubrique courrier du cœur. A partir des années cinquante ses récits, qui virent du rose au noir, paraissent dans des collections policières.

Il crée un héros, un médecin radié de l'ordre pour euthanasie, qui devient collaborateur des services de la Justice de Milan. C'est un humain qui nous ressemble, généreux, et à qui la bêtise et le crime font piquer de terrifiantes colères froides.

Les Enfants du Massacre est le chef-d'œuvre de cet auteur. Dans ce récit l'ancien médecin doit dépasser son dégoût pour ausculter ce massacre commis par des gamins marginaux de la banlieue de Milan. Amoureux de cette ville, Scerbanenco la chérissait, mais dévoilait ses horribles protubérances. L'opulence et la richesse dont bénéficie la capitale lombarde, centre géographique et, de ce fait, plaque tournante de tous les trafics, déforment cette ville...

C'est aujourd'hui le malaise des banlieues que Scerbanenco dénonçait il y a trente ans. Il démontrait que l'image familière de nos grands centres urbains se doublait au noir et pas toujours le soir.

Les Enfants du massacre de Giorgio Scerbanenco, éditions Rivages/Noir, 254 pages, 8,22 euros.

Le déjeuner du Coroner

cotterillEcrivain londonien né en 1952, Colin Cotterill a enseigné et voyagé dans l’ancien Empire britannique, notamment au sein d’ONG pour la réinsertion des enfants prostitués. Aujourd’hui il vit en Thaïlande. Ce premier épisode des aventures du coroner Siri a reçu le prix polar SNCF 2006.

Laos, 1976. Les communistes du Pathet s’emparent du pouvoir. La plupart des intellectuels et tous les fonctionnaires quittent le pays. Siri Paiboun, un médecin qui a fait ses études à Paris, reste chez lui. À 72 ans, le docteur-camarade Siri, qui n’a jamais pratiqué d’autopsie, est nommé coroner principal du Laos. Il devient de fait le seul coroner, mais il se verrait mieux comme un Maigret à la sauce saté. Ce vieux sage revenu de tout considère que le commissaire parisien est son mentor. Tous les regards vont se tourner vers lui lorsque la femme d’un ponte du Parti meurt en plein banquet et que les cadavres de trois soldats vietnamiens sont retrouvés flottant sur les eaux d’un lac. Déterminé à résoudre ces crimes en dépit des tentatives d’intimidation, Siri mène l’enquête, recrutant au passage quelques vieux amis, mais aussi les chamans hmong, les esprits des forêts, et même ceux des morts qui le visitent en songe.

Le déjeuner du Coroner de Colin Cotterill aux éditions Livre de poche, 320 pages, 6,27 euros.

Dans la vallée de l’ombre de la mort

ombre_mortÀ l’automne 1864 en Virginie, les soldats de l’Union contre ceux de la Confédération font la guerre de Sécession. Dans les deux camps, la balle Minié (nom du militaire français qui l’inventa) fait des ravages. Cette balle conique pénètre et broie tout autour de l’os, conséquence: le membre atteint doit être amputé. Une scie, des chiffons, de l’eau, du fil, une aiguille, un tonneau pour jeter ce qui tombe, voilà tous les outils dont disposaient les médecins.

Un chirurgien qui ne peut plus opérer a été nommé respon-sable des services de santé de l’armée nordiste. Ce colonel manchot, Simon Wolfe, organise la prise en charge sani-taire après les combats. D’une description soignée, la recréation de l’ambiance de ce conflit flanque le cafard. Durant une inspection, cet homme de l’art découvre qu’un tueur s’attaque aux «Dunkers». D’origine allemande, ces protestants baptistes sont des pacifistes qui refusent de porter les armes. La justice étant à la guerre ce que la musique est à un militaire, une fois posé le problème s’avère compliqué. Les généraux ont une tendance naturelle à ignorer les civils. Mais un jour la paix sera de retour et les politiques s’inquiètent de leurs futurs électeurs rescapés. Heureusement, l’honnête colonel pourra faire quelque chose.

Ancien agent fédéral détaché auprès des réserves indiennes, connaissant la culture amérindienne, Kirk Mitchell est davantage connu pour sa série d’enquêtes menées au sein de cette communauté par les agents Emmett Parker et Anna Turnipseed.

Dans la vallée de l’ombre de la mort de Kirk Mitchell aux éditions Folio Policier, 525 pages, 7,69 euros.

100 bullets: première salve

100Ayant acquis le catalogue, Urban Comics réédite la saga des «Cent balles». Une seconde chance de se cultiver s’offre aux amateurs. Cet ouvrage est un plaisir à lui tout seul, donc personne n’est obligé de s’abonner aux cent épisodes de la série, débutée en 1999. Chaque opus fut conçu pour être lu sans prendre en compte le destin des autres protagonistes. Au début, tout commence à l’arrivée de l’agent Graves. Cet inconnu vous propose un accord. Il vous donne un attaché-case contenant le dossier complet des responsables de votre insondable malheur et un pistolet avec cent munitions intraçables. Se faire justice soi-même sans risque devient une possibilité. À prendre ou à laisser.

La première à affronter ce choix cornélien est une femme. Une jeune Latino sortie de prison nommée Dizzy, brûlée dans sa tête jusqu'aux pieds, elle n’a plus rien. Son mari et son enfant ont été abattus par une police pourrie et non par les membres d’un gang comme elle le pensait. Une erreur due à une énorme bévue. En parallèle, le mystérieux agent Graves propose son marché à un pauvre type nommé Lee Dollan. Des accusations de pédophilie l’ont laissé sans un sou. Deux destins marqués par le sceau de la fatalité. Et l’agent Graves deviendra le fil conducteur d’une conspiration exploitée avec bonheur par ses auteurs. Dizzy reviendra dire bonjour...

100 bullets: première salve de Eduardo Risso et Brian Azzarello aux éditions Urban Comics album, 176 pages, 16,63 euros

Le musée du docteur Moses

Le musée du docteur MosesOates a débuté son œuvre à quatorze ans, depuis elle n’arrête pas. En 1968 elle a 30 ans et l’Institut des Arts et des Lettres la distingue pour un roman d’étude sociologique Le Jardin des merveilles. Son roman Blonde racontait Marilyn Monroe, l’icône américaine mise en perspective pour les attentes du public par le star système hollywoodien. Deux fois en lice pour le Nobel de littérature, elle a déjà écrit des «thrillers» sous des pseudonymes. Comme une suite à ses écrits romanesques, son théâtre social, un recueil d’histoires bizarres paraît enfin sous son nom.
Le décor de ces récits est vite planté, l’action n’intervient que dans le quotidien banal de personnages divers, qui vont sortir de l’ordinaire par la porte de l’horreur.
La lecture de la première fable, qui raconte ce qui arrive quand on répond aux inconnus qui demandent: «Salut, comment ça va?» pendant le jogging quotidien, est à vous dégoûter de courir. La nouvelle donnant son titre au recueil raconte, quant à elle, la visite d’une petite boutique des horreurs, effectuée en compagnie du plus charmant des docteurs. La recherche du détail qui cloche, les propos sibyllins, l’atmosphère qui s’alourdit, voilà tout ce qui va inquiéter notre bon lecteur. Ce qui n’est pas sans rappeler le naturel et les bonnes manières du maître du suspense, Alfred Hitchcock. Ces textes exhalent aussi un relent du passé, comme un rappel tortueux de l’Edgar Allan Poe qui sommeille en Joyce Carol Oates.

Le musée du docteur Moses de Joyce Carol Oates aux éditions Philippe Rey, 256 pages, 20 euros

lundi 23 juillet 2012

Bonus


bonus
Une réédition de ce roman paru chez Grasset, dont l’auteur est un ancien de chaîne de télévision privée. Journaliste, scénariste, il était l’auteur des dialogues des personnages qu’interprétait Antoine de Caunes dans l’émission «Nulle part ailleurs». Devenu écrivain, il a créé une série ayant pour fil conducteur la Côte d’Azur.

Dans leur maison du Var, Romain et Charlotte sont en quête de la réussite. Monsieur est dans les travaux publics, madame est une esthète dont la vocation vient d’éclore. Elle vient d’être sélectionnée pour l’émission «Nouvelle star». Un soir, en absorbant le journal télévisé, ils sont saisis d’une illumination lucrative. Ils vont kidnapper le fraudeur qui passe au «20h», le même qui est soupçonné d’avoir volé une fortune. Dans leur projet de libre entreprise, ils comptent intégrer le demi-frère de Charlotte. D’après ce couple exemplaire, voler un voleur est une riche idée. Pourtant ils ont conscience de ne pas posséder toutes les compétences requises. Heureusement le beau-frère, lui, doit s’y connaître puisqu’il sort de prison. Ces génies associés vont s’attaquer à des millions qui font déjà courir les vilains. Le spoliateur, qui ne songeait qu’à son parachute doré, se débat déjà avec sa famille et son avocat. Il ne peut se fier à personne pour profiter de ses biens mal acquis. Sa célébrité a beaucoup nui à cet homme. Une critique d’un style de société qui se bâtit grâce au nouvel axiome: comment devenir millionnaire en regardant la télévision.

Bonus de Laurent Chalumeau aux éditions Rivages/Noir 437 pages, 9,17 euros

Rocketeer



RocketeerEmporté par une leucémie le 11 mars 2008, le dessinateur Dave Stevens avait débuté sa carrière en 1975 avec Russ Manning sur Tarzan. Par la suite, il collaborera avec Spielberg sur les visuels des Aventuriers de l’arche perdue, il travaillera aussi sur les clips de Michael Jackson pour Thriller. Il a vingt-sept ans quand il invente The Rocketter, un chef-d’œuvre esthétique en bande dessinée qui ranime le style des «pulps».

L’originalité de cette série en B.D. est de réinventer le style d’une modernité, telle qu’elle aurait pu être imaginée par les créateurs d’avant la Seconde Guerre mondiale. Tout en y ajoutant cette touche de modernité sexy grand public, les lecteurs n’ayant plus besoin d’être avertis depuis la libération sexuelle des années 1970.

Le personnage principal de ces récits d’aventures est Cliff Secord, un aviateur qui se produit dans des spectacles aériens et qui découvre un équipement de fusée dorsale. À partir de là, il devient la star spéciale de services pas ordinaires. Dans les dialogues on retrouve la verve narrative typique des récits d’action épiques des années trente et quarante. Les méchants sont de séduisants pervers avides de pouvoir et d’argent, le sportif candide devient un héros.

Rocketeer de Dave Stevens aux éditions Delcourt, 126 pages, 17,95 euros